« I wanna hide the truth, I wanna shelter you
But with the beast inside, there's nowhere we can hide, no matter what we breed, we still are made of greed, this is my kingdom come »

- Es-tu sûr, Thadas ?  , avait fait la Reine en observant attentivement son bras droit au visage encore plus sérieux que d'ordinaire.

La situation était tendue, c'était certain. Cela faisait bientôt une semaine que la courtisane et le voyageur avaient disparu sans laisser d'explications là-dessus. Était-ce une fuite entre amoureux ? Pourquoi fuir, en ce cas ? Peut-on être certains qu'ils ont disparu ensemble et non par voies séparées et que c'est uniquement le hasard qui a voulu que ce soit en même temps ? Qu'est-il advenu d'eux ? Et si c'était un mauvais coup de la Confrérie qui aurait été commanditée pour commettre un kidnapping, afin de jeter de l'ombre sur la Reine ?
Toutes les hypothèses pouvaient être possibles, cependant, tant que le duo n'aura pas été retrouvé, leur cas resterait un mystère. Il faut les retrouver, il est bien trop aisé de disséminer de calomnieux ragots quand le voile d'une affaire n'a pas été soulevé et jeté au loin.




Le Grand Prêtre avait posé son pouce et son index autour de sa fine barbe, réfléchissant intensivement, pesant les pour et les contre. Il avait ensuite fait quelques pas tranquilles comme pour s'aider à amasser mentalement tous les éléments de leur situation actuelle.




Purée, cette disparition ne pouvait pas tomber plus mal. Les relations entre les Ijobiens et les étrangers commençaient tout juste à s'adoucir un peu plus, et voilà que c'est devenu tendu et électrique au point d'en alourdir les plans subtils de l'atmosphère de façon assez déplaisante.

- Ce Genzo... Tu l'apprécies beaucoup, j'ai l'impression.  , fit ingénument la souveraine en battant des cils.

Ohhh.... il connaissait cette petite lueur au fond de son regard. S'il avait été américain, il aurait presque pu imaginer la rousse avec son pot de pop-corn s'installant dans un coin de son sublime cerveau. Que lui avait donc raconté Dahma ? Il n'aurait pas tout entendu de son entrevue avec le borgne, non ?
Thadas ricana légèrement et haussa nonchalamment les épaules.




- Oh... je n'insinue rien. Son doux visage redevint grave alors que le sérieux de son regard s'accentuait, effaçant le léger sourire en coin qu'elle avait eu. Je vais appeler des conseillers pour qu'ils nous rejoignent dans cette salle, maintenant que tu m'as communiqué ton avis. Une fois mis d'accord, nous inviterons ce Genzo pour lui expliquer la situation, s'il s'agit en effet du choix le plus judicieux. Je te fais confiance, Thadas, seulement, il nous faut d'abord discuter de tous les paramètres de cette mission.

Ils discutèrent tous, en effet, et il fut choisi que l'ancien Oyabun et le Grand Prêtre fassent la paire pour cette aventure. Leur petite assemblée convoqua donc le japonais et lui expliqua ce qu'il y avait à expliquer. Le religieux, qui avait croisé les bras avec une attitude sérieuse et concentrée, sentit une brève et douce lueur  passer dans ses ambres quand le voyageur entra. Ça faisait un moment qu'ils ne s'étaient pas vus, depuis leur première rencontre... il semblait complètement remis. Tant mieux, parce qu'il va y avoir de la route pour arriver à Irin, et probablement pas mal d'obstacles dus au terrain sauvage.

Quant Genzo dit vouloir plutôt se déguiser en prêtre, Thadas réfléchit à quel dieu il pourrait être rattaché de façon crédible si jamais ils sont dans l'obligation d'interagir avec des personnes, sur le chemin. Ils se dirigent vers les montagnes...... peut-être Oke ? Ils pourraient prétexter d'être en voyage pour se recueillir dans le sanctuaire du dieu de la montagne, profitant de passer par la forêt pour faucher quelques herbes sacrées à son intention - ça pourrait être un bon moyen de détourner les éventuels soupçons si on demande pourquoi le Grand Prêtre s'aventure dans ce coin avec un "confrère".

Le prêtre posa sa paume contre les naseaux du cheval alors que les préparatifs s'activaient - ils étaient presque finis, d'ailleurs -, caressant tranquillement sa joue avec son autre main. Même s'il est vrai qu'il préfère se déplacer à pied, il a toujours aimé être en présence d'équidés. Il y a à la fois une telle douceur et une telle fougue au fond de leur regard... Il a du mal à ressentir autre chose qu'un profond respect lorsqu'il les côtoie. (Les chevaux ijobiens, croyez-moi, c'est quelque chose niveau caractère, même quand ils sont dressés.)

- Hey Grand-prêtre.

L'homme au ruban détacha ses agates du destrier pour les poser sur son compagnon de voyage, en profitant pour le détailler avec son nouvel apparat. Il hocha subrepticement la tête, glissant son regard s'étant fait appréciateur l'espace d'un instant de nouveau sur le quadrupède.

- Hey.

Les gardes avaient semblé beaucoup plus attentifs à leurs réactions dès l'instant où le borgne s'était adressé à lui. N'allons pas leur donner de quoi alimenter les potins.

La suite, par contre, fit naître un sincère étonnement sur son faciès, faisant de nouveau reposer son regard sur lui. Il n'avait pas pensé à la possibilité que Genzo ne sache pas monter à cheval.
Ah mais.... c'est vrai. Il lui avait bien dit qu'ils avaient des sortes de "machines".... des machines évitant de fatiguer les autres animaux malgré tous les dégâts qu'elles semblaient faire.

Même si la solution à ce problème avait rapidement émergé à la surface de son esprit, l'entendre sortir de la bouche du chanteur lui fit hausser un sourcil un peu amusé. Il se retint de justesse de sortir une phrase à double-sens à sa sauce, se rappelant qu'ils sont en mission et qu'il faut qu'il reste concentré pour être sûr de ne rien oublier - tiens, par exemple, c'est pratique d'avoir des gourdes d'eau potable quand on part en voyage pour quelques jours. Pour les humains, et pour les - le - cheval du coup.

- D'accord. Je tiendrai les rênes. Ah, avant que je n'oublie.... tiens.

Il lui tendit un petit bâton de prêtre chantant ainsi qu'une faucille argentée en lui indiquant où les placer pour que ça ne le gêne pas dans ses mouvements - l'un à l'aide d'une bandoulière dans le dos, l'autre à la ceinture. Un petit sourire à la fois taquin et sérieux plissa le coin de ses lèvres.

- Comme ça, on dirait un vrai prêtre. Tu as presque tout l'attirail qu'il faut... et de quoi te défendre aussi. Malgré le poids du sac sur ses épaules, il monta avec aisance sur le dos du cheval tout en continuant de parler calmement, tendant une main à l'ancien bandit pour l'inviter et surtout l'aider à le rejoindre devant. Je te montrerai comment les manier quand on fera des pauses, si tu le souhaites.

Il faut qu'ils se mettent en route, maintenant que les préparatifs sont terminés. Thadas s'adressa aux gardes.

- Transmettez un message à Ode de ma part. Dites-lui de redoubler de vigilance.

Thadas savait qu'il n'y manquerait pas, mais, aussi étonnant que ça puisse paraître, le prêtre le considérait comme l'une des seules personnes étant dignes de la confiance d'Ayaba. Oh, il ne le dirait, ne l'avouerait jamais, mais comme il partait pour un moment, il espérait qu'il comprendrait le double-sens de sa phrase. Plus que la sécurité de la Reine, il lui demandait de faire en sorte que les tensions n'explosent pas - le blondinet savait y faire. Le religieux ferait de son mieux pour régler le souci du duo manquant le plus efficacement possible, alors hors de question que lorsqu'il revienne des violences aient déjà éclaté. Il ne laissait bien évidemment pas tout ce poids au garde royal, cependant, plus que jamais, faites que ses sens de sale cabot servent à quelque chose d'autre qu'à foutre en l'air ses plans drague.

Sur ce, en route pour l'aventure.

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Le vent de la liberté caressait sa peau et ses étoffes alors qu'il les accompagnait tous les deux sur le long chemin vers les mines. C'était calme, tranquille, paisible. Ils étaient sortis d'Oluh depuis un bon moment maintenant, parvenant à ne pas attirer trop de regards.

Thadas ne put s'empêcher d'avoir un petit regard amusé quant aux tentatives maladroites du brun de s'harmoniser avec les tressautements du trot du cheval, mais ne dit rien. Après tout, lui-même était passé par la même épreuve dans le passé et il savait qu'elle n'avait absolument rien d'agréable. Il aurait voulu l'aider d'une manière ou d'une autre mais il lui fallait aussi rester attentif à leur parcours, et puis au bout d'un moment le borgne sembla avoir compris le truc. C'était mieux, beaucoup mieux. Mieux pour lui, mais aussi pour le destrier parce qu'au bout d'un moment ça aurait fini par lui faire mal au dos de se recevoir un postérieur à répétition, et puisque de toute façon ils étaient bons pour au moins deux jours à cheval, mieux valait ménager le bestiau. Il fallait tenir un bon rythme mais ça ne servirait à rien de galoper comme des fous, surtout que la suite ne dépendrait plus que de leurs guibolles. Alors, il laissait le paysage défiler autour d'eux, sa beauté farouche le prenant aux sens. L'air embaumait des effluves de la végétation, le goût du vent sur ses lèvres apportait un brin de légèreté à la gravité de la situation, des grillons et des oiseaux chantaient et sifflotaient en corrélation, cette masse chaude contre son torse lui faisait du bien - pour un début, c'était pas trop mal, cette mission. Il respira profondément, sentant les muscles de l'équidé rouler puissamment - il faisait partie des plus endurants d'Ijoba, cependant Thadas sentit qu'il aurait bientôt besoin de se poser à l'ombre pour brouter un peu d'herbe et s'hydrater ; de même que ses passagers.

Genzo prononça les premiers mots depuis qu'ils avaient quitté la ville - s'il lui avait tout d'abord paru un peu nerveux, la nonchalance de son attitude démentit cette impression.

- Je suppose que tu m'as donné la tenue d'un type particulier de prêtre. Parle moi de vos dieux, que je ne dise pas de connerie. Ha... Et au passage... J'suis content de faire ce voyage avec toi.

Le Grand Prêtre apprécia cette démarche informationnelle et culturelle. Il n'était pas exactement du genre inquiet, mais une petite part de lui fut rassurée de retrouver un peu de cette complicité fusionnelle qu'ils avaient eue tous les deux.
"Espèce d'abruti, il pourrait tout aussi bien te planter un poignard dans le cou."  , lui souffla une voix, celle qui gardait en tête qu'il avait le sang de plusieurs humains encré dans ses mains comme les lettres d'un triste roman. Mais.... il n'avait pas envie d'écouter cette voix alors que celle de son intuition lui paraissait plus juste.

- C'est réciproque chaton.  , sourit-il tranquillement après avoir légèrement pouffé. Après un instant, il ajouta calmement : Tu as l'air en meilleure forme que la dernière fois. C'est rassurant.

Ce serait mentir que dire qu'il n'avait hésité pendant une fraction de seconde à ajouter ce petit surnom remontant à leur première rencontre, mais il parvint à rendre cela imperceptible. Il n'avait pas envie de créer de tensions, d'autant que ces paroles sont sincères. Il se sentait à l'aise avec cet ancien bandit. Et, pour le coup, comme c'est son partenaire, autant rester dans une lancée plus qu'amicale... c'était toujours plus efficace et agréable.
Il s'humecta les lèvres en réfléchissant à comment ordonner les informations quant aux dieux afin d'être le plus clair possible, prenant quelques secondes comblées par un léger "hmmm" songeur.

- Puisque nous allons dans la direction des montagnes, j'avais pensé que tu pourrais te faire passer pour un prêtre d'Oke, qui en est le dieu. Il marqua une petite pause. Chez nous, chaque dieu est en charge d'un élément de l'univers, matériel ou intangible. Le vent que tu sens dans tes cheveux est dû aux souffles d'Afefe par exemple, mais je vais d'abord commencer par te donner les noms et domaines des dieux d'Oluh puisque c'est de là que tu diras venir si jamais nous tombons sur des gens indiscrets.

L'herbe ployait docilement sous les lourdes et souples jambes du canasson aux yeux attentifs qui soufflait parfois plus fortement par les narines que d'autres - probablement pour envoyer bouler quelques mouches insolentes qui vrombissaient près de son visage. Thadas rajusta sa prise tranquille sur les rênes tout en continuant ses explications, claquant d'abord légèrement de la langue pour s'assurer de l'état de leur monture ; bon, ils vont continuer encore un peu puis se poser, ça ne les empêcherait pas de discuter.

- Commençons donc par le père de toutes les grandes divinités : Oorun, le grand soleil flamboyant.

Thadas commença donc à raconter la création du monde avec les dieux, parlant tranquillement pour laisser le temps au voyageur d'enregistrer les informations, veillant à ne pas l'ensevelir sous elles parce qu'il est vrai qu'il y en a beaucoup. Une fois le contexte installé, il put enfin placer des noms et des pouvoirs sur les dieux d'Oluh, puis, pris dans la frénésie de transmettre ses connaissances, étendit son discours aux dieux d'Aisiki et d'Isokan, en profitant aussi pour clarifier le rôle et la place de chaque village à Ijoba. Connaissance et pouvoir, chasse et soins, agriculture et artisanat. C'est d'ailleurs à ce point de sa tirade qu'il ralentit doucement le rythme du trot jusqu'à ce que le cheval s'arrête, à l'ombre d'un chêne. Il expira profondément, puis glissa délicatement, ses pieds se posant souplement au sol. Il se déchargea de son lourd sac, puis tendit les bras vers Genzo avec un petit sourire malicieux.

- Nous allons nous poser un petit moment. Viens, je t'aide à descendre.

Quand on n'a pas l'habitude de monter à cheval, il est vite arrivé de se casser la margoulette en essayant de descendre. Mieux vaut avoir quelqu'un pour nous porter à ce moment-là afin de s'assurer une descente en sécurité.

- Beaucoup d'Ijobiens craignent Oke car l'on dit qu'il aurait jeté une malédiction aux montagnes faisant que les imprudents s'y aventurant y disparaissent pour ne plus jamais revenir. Cette brèche créée dans les montagnes par l'ouragan... Nous n'arrivons toujours pas à savoir si c'est le signe d'un changement prochain ou d'un autre malheur en approche.  , ajouta Thadas en revenant au sujet du dieu rocheux, un petit pli soucieux se formant entre ses deux sourcils alors qu'une sombre lueur s'agitait au fond de ses ambres.

Il se saisit de la bride pour l'attacher solidement à une branche basse pendant que le destrier arrachait des touffes d'herbes tendres avec passion, passant sa paume sur son encolure aux veines pompant ardemment après l'effort fourni, marquant un nouveau silence semblant pouvoir s'étendre à l'infini.

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Le religieux suspendit ses caresses pendant une fraction de seconde face à la question de son partenaire de voyage, puis reprit pendant encore quelques instants.

- Moui.   , répondit-il vaguement, haussant légèrement des épaules comme pour éluder la chose et reportant son regard sur lui avec un visage neutre, la gestuelle calme.

Le haut officier était bien placé pour savoir que la peur, manipulée avec adresse, peut se révéler être un redoutable outil de contrôle sur un humain. Dévoiler ses faiblesses à quelqu'un sans savoir exactement ce qu'il compte en faire, c'est prendre le risque de tomber sous sa coupe si l'esprit manque de force. Par instinct de préservation pour les siens, Thadas jugea bon de ne pas s'étendre sur le sujet - le moment viendrait, probablement, où il montrerait plus en profondeur à Genzo les mœurs et les craintes de ses semblables, mais s'il l'a aussi choisi comme compagnon de route, c'est pour qu'il fasse ses preuves devant, avec lui. La seule raison l'ayant poussé à lui parler de l'effroi que provoquent les montagnes dans les cœurs de beaucoup d'Ijobiens, c'est qu'il puisse saisir plus précisément l'essence, l'ambiance se dégageant d'un prêtre d'Oke, qu'il voie que cela va plus loin que de "simplement" vénérer un dieu. Oke est sans pitié, la majeure partie du temps - il aurait très mal vécu certains mythes si l'on s'en fie à eux. C'est un peu sombre, ce qui l'entoure. Les gens, consciemment ou sans s'en rendre compte, ont tendance à éviter tout ce qui a un rapport avec lui - une telle aura de mystère englobe les monts qu'il est difficile de ne pas ressentir de l'appréhension quant à leur dieu.

- Pour l'instant chaton, c'est tout ce que tu as besoin de savoir en tant que "prêtre" d'Oke.  , fit-il en croisant nonchalamment les bras, ayant scruté attentivement du coin de l’œil tous les mouvements à l'air un peu familier qu'il avait auparavant faits.

Ses lèvres s'étaient élargies en une moue amusée en voyant l'ancien bandit s'approcher de lui, le tigre en lui montrant presque les crocs en sentant l'atmosphère se teinter de ce quelque chose de si particulier, présent lorsque leurs deux esprits s'apprêtent à se croiser. Intuitivement, ils sentaient la danse des fauves revenir dans leur discussion avec un naturel surprenant compte tenu de leurs conditions respectives. Le tigre resta passif dans ses prunelles, observant les pas de la panthère, son regard et ses mimiques éphémères. Il décroisa petit à petit les bras alors que la distance se faisait plus courte, détendu. Il jaugeait la situation de sa vision perçante.
Voyons... Audace ou sagesse, cette fois ?

- Est-ce qu'il y a des choses que je ne dois pas dire... un nom à prendre peut-être ? Je pense que Genzo n'est pas un prénom habituel ici.

L'espiègle sage avait posé sa main sur la sienne et détourné le regard.
Par Oorun, au même titre que les étincelles habituellement provoquées par la hardiesse, qu'est-ce qu'il aimait quand quelqu'un était capable de rester focalisé sur le travail à faire.
Il posa son autre main par-dessus la sienne avec délicatesse, hésitant un instant à effleurer sa joue - en réalité, ils tatônnaient tous les deux un petit peu, pour sa part recherchant ses marques - leurs marques -, essayant de voir les limites et non-limites de leurs deux territoires. Lui aussi, devait se concentrer.

- En effet... après, il se peut que ton accent te trahisse donc prend garde, même s'il y a peu de probabilités qu'on tombe sur quelqu'un. Si j'ai un conseil à te donner, c'est d'éviter de parler de "kébbabe" ou de "vode-kka" ou de tout ce qui d'après toi n'existe pas ici. Pensée à Lou et ses tranches de jambon humain. Pour ce qui est du nom... hmm.....

... Zilbree ? Non, ça ferait peut-être un peu osé et pas très crédible, c'est plus un surnom, ça... même s'il l'utilise beaucoup avec Genzo. Peut-être que...

- ... Si on ijobiennise ton nom, ça donnerait probablement quelque chose comme [Gu]-[yen!]-[dza]-[wọ]... Qu'en penses-tu ?

Sa paume caressa discrètement son poignet mais resta sur le dos de sa main, cherchant son avis, son accord. Si ça se trouve, ils n'auraient même pas besoin d'utiliser cette identité qu'ils construisaient, sur le chemin, mais au cas où elle doive servir, il voulait s'assurer que le borgne s'y sentait à l'aise. Il lui sourit sereinement bien que les souvenirs de leur première rencontre allumèrent une petite lueur pernicieuse au sein de ses yeux.

Doucement, tout en écoutant l'éventuelle réponse de Genzo, il glissa ses mains hors de la sienne pour s'accroupir souplement devant son sac, fouillant tranquillement dedans. Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour trouver ce qu'il cherchait : deux gourdes d'eau. C'est avec une attitude un peu joueuse qu'il se releva pour lui en remettre une, puis déboucha la sienne afin de boire quelques petites goulées économes, s'humectant les lèvres à la fin et soupirant silencieusement. Il faut penser à s'hydrater régulièrement, c'est important, surtout qu'Oorun commence à se faire particulièrement ardent.
Ceci fait, il replongea ses ambres dans l'onyx du voyageur avec une stature ancrée mais paisible, le cheval continuant de brouter à côté en agitant les oreilles pour virer les mouches qui harcelaient son ouïe.

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Okay. Même s'il ne comprenait pas la raison de la venue de ce fou rire, clairement, même s'il ne le dirait probablement pas, le montrerait encore moins, peut-être qu'il l'assumerait en face de lui-même au moins, mais, il l'aimait bien. L'ancien Oyabun souffla un nom et une phrase qui éclaircit tout de suite beaucoup mieux ces francs éclats : Lou. Yeux comme des billes, vous n'en trouveriez pas comme ceux de Thadas à cet instant. Comment a-t-il deviné qu'il pensait exactement à elle et ce qu'elle lui avait appris lors de leur visite guidée ?
Ahhh, Lou.

Et. Merde. Vous les voyez, ces barrières qu'il essaye de maintenir avec délicatesse depuis tout à l'heure ? Rangée par rangée, il les sentait se faire bouffer par le matou en face de lui. Merde. Il avait toujours eu du mal à résister à la sincérité d'un cœur, alors vous imaginez quand celui-ci s'exprime par quelque chose d'aussi bienfaisant qu'un rire ? Il rangea soigneusement leurs gourdes dans sa besace alors que Genzo s'épanchait sur tout le bien qu'il pensait de la brune. Ça donna envie à Thadas de s'ouvrir un peu plus, d'autant qu'il était d'accord sur beaucoup des points qu'il avait énoncés.
Il enregistra dans un coin de son esprit le : "On ne juge pas la vodka." Mais, si on évoque la possibilité qu'on la juge, en un sens, c'est peut-être qu'il y a matière à la juger aussi ? Au tour de Thadas de rigoler un peu, égayé par cette nouvelle ambiance de fraîcheur et de convivialité qui les entourait.

- Tu n'imagines pas ! Tu sais qu'à cause d'elle, j'ai clairement cru qu'il y avait potentiellement des cannibales dans votre groupe ? Une histoire de Christ avec son pain, son sang et son cul je crois. Enfin c'est pas plus mal parce qu'elle m'a orienté vers un connaisseur religieux des vôtres, et devine quoi : certains d'entre vous pensiez aussi que nous étions des mangeurs d'hommes. C'est un sacré malentendu qu'elle nous a permis de régler, involontairement, et beaucoup de soucis d'épargnés. Pour la vodka... j'ai un ami qui serait éventuellement intéressé de s'en descendre un verre si jamais vous nous apprenez la recette, mais très peu pour moi. Enfin, je ne juge pas et puis je n'y ai encore jamais goûté donc je ne peux pas vraiment juger....... mais....

..... Hmmmm. Peut-être pas une bonne idée de dire qu'il ne tient pas vraiment bien l'alcool. Probablement une mauvaise idée aussi, de dire qu'il a du mal à se contrôler quand il est pompette. Son regard fuit discrètement sur la droite puis revint lorsque son épiderme tressauta subtilement sous le toucher du borgne. Ça le fit sourire un peu en miroir de Genzo et plisser un œil, surpris puis amusé, observant calmement sa main puis son visage. Il cligna des paupières, la face tranquille, même s'il ne pouvait s'empêcher d'avoir l'impression qu'ils étaient comme deux aimants dansant ensemble avec un peu d'hésitation. Un peu fébriles, des fois ; plus sûrs, d'autres. Pour un peu, il frissonnerait.

- En vrai, si t'as des questions, tu peux me les poser hein... Je vois pas pourquoi les connaissances iraient que dans un sens.

Heh.

Il sait comment lui parler, lui.

- Puis, je compte te demander d'apprendre à lire votre langue. Lire me manque, et je suis un peu bloqué dans mon apprentissage tant que je n'ai pas l'arme des savants.

Thadas soupira sobrement...
...
Ouep, il sait très bien, même.

Il avait soupiré, parce qu'il avait senti une autre barrière commencer à se ramollir en lui. D'abord de la franchise, ensuite de la joie, maintenant du savoir, il commençait à bien le cerner le voyageur. Merde.
Au final, il ne savait pas si ça lui plaisait ou si ça l'embêtait. Heureusement, sa dernière barrière, la plus forte, la barrière de la vigilance, elle, il était sûr qu'elle ne le lâcherait pas en route de sitôt, donc il était plutôt serein quant à ça. Le truc c'est que, si ça continue, le tigre en lui allait finir par ronronner, et ça, ça ne lui arrivait que rarement, gardant en général toujours une griffe de sortie au cas où.

- Après, je peux comprendre que tu dises non ! Surtout actuellement ! Mais... c'est dit.

...

"Rah.
...
Faiche."
...

Ses paumes s'approchèrent puis se posèrent avec nonchaloir contre celles que Genzo levait, et Thadas entremêla doucement leurs doigts au fil des secondes, un petit sourire en coin amenant un peu d'innocence à la cupidité de son regard - le voyageur devait la connaître, à force, même si c'était la deuxième fois. Il pouffa légèrement avec une petite moue féline et sérieuse, fixant ledit regard droit dans celui du faux prêtre. Il marqua un calme silence, haussant un sourcil sérieux, puis déclara :

- De toute façon... je t'ai dit que je t'apprendrai des chants sacrés... pas vrai ?

Ça en faisait, des choses à lui apprendre à la longue. Enfin bon, Thadas aime enseigner et être généreux est aussi dans sa nature profonde, alors finalement, ça ne l'embêtait pas voire même tout le contraire. Son souffle s'approcha lentement de son oreille pour y déverser quelques mots déterminés.

- Et tout ce que tu peux m'apprendre... je le prendrai... Merci.

Ça avait le mérite d'être clair. Tout, tout, tout ce qu'il lui permettrait de s'accaparer, il le ferait avec une fougue et une volonté semblables à celles du cheval à côté d'eux. Avec douceur et quelques secondes de plus, Thadas défit leurs mains - un rappel du passé ? un appel du présent ? -, s'éloignant avec un peu de malice, l'air posé. Le regard qu'il posait sur Genzo était tranquille et un peu pétillant dans son fond ambré ; il fit quelques étirements du buste et des bras maîtrisés, puis après s'être légèrement frotté les mains, fit un discret geste du menton en direction du destrier.
"En route ?"
Autrement formulé, était-il en état de remonter tout de suite ou lui fallait-il quelques minutes de plus ? La situation était urgente, mais il fallait aussi savoir gérer sa propre énergie pour mener à bien la mission.

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