« I wanna hide the truth, I wanna shelter you. But with the beast inside, there's nowhere we can hide. No mattert what wee breed, we still all made of greed. This is my kingdom come »

La voix des Dieux, le chant des Hommes

C'était un après-midi calme.
Le vent soufflait un brin de fraîcheur dans les rues d'Oluh et l'enceinte de son palais, les gens s'affairaient tranquillement à leurs travaux quotidiens, certains discutaient entre eux, d'autres turbinaient pour récupérer des commandes ou pour filer aux cuisines. L'ouragan semblait n'être qu'un mauvais souvenir dans certains endroits, les reconstructions avaient été assez rapides et chacun avait repris un rythme de vie habituel ou presque.
D'autres flânaient en bâillant parfois grossièrement, mais se reprenaient quand une paire d'ambres bien connue les fusillait allégrement dans son passage, faisant s'accélérer leurs pas.

Le Grand Prêtre marchait d'un pas assuré et confiant, la respiration tranquille et prêt à motiver d'un petit coup de pression ces fainéants qu'il croisait éventuellement dans les couloirs, sans même dire un mot. Ils ne peuvent pas se relâcher tout de suite, pas tant que tous les dégâts n'ont été complètement réparés. Il faisait de son mieux pour distribuer des paroles rassurantes et pleines de paix et de sérénité, mais ça lui serrait le cœur de voir encore quelques familles dont la maison n'a toujours pas été finie d'être reconstruite. Les Ijobiens ont besoin de se sentir en sécurité surtout avec la présence de ces étrangers dont on ne connaît que très peu de choses pour l'instant, et pour ça, il est bon de commencer par les aider à retrouver un toit qui leur est propre.

En parlant de ces étrangers... ce jour-là, le religieux avait décidé de leur payer une visite pour voir de plus près ce qu'il en est, de faire plus ample connaissance en somme. Analyser et essayer de déterminer s'ils représentent réellement une menace pour Ijoba et la Reine ou s'ils sont assez inoffensif pour une éventuelle cohabitation. De plus, Thadas ne doutait pas qu'ils recelaient probablement moult connaissances inconnues de ces contrées, alors ils l'intriguaient d'autant plus. C'était rare, mais le Grand Prêtre avait un petit moment de libre et comptait bien le mettre à profit pour voir ce qu'il en est.

Il commencerait peut-être par ceux qui lui semblent les plus douteux ou en tout cas les plus soucieux de leur condition. En même temps, il ne pouvait pas trop les blâmer, s'il était à leur place, il serait franchement agacé que l'on limite sa liberté de mouvement ainsi, mais c'était nécessaire pour assurer la sécurité et la quiétude d'Ijoba.
Alors qu'il s'approchait de l'aile des étrangers, quelques douces mélodies attirèrent son attention.

Silencieux, curieux, il s'aventura dans cette direction, ses sandales frottant le sol d'un son feutré. Il s'arrêta à l'entrée de la pièce et observa sans aucune gêne, ses bras se croisant lentement, la stature toujours droite bien qu'il posa légèrement son épaule contre l'ouverture dans une attitude à la fois détendue et attentive. Ses oreilles appréciaient les vibrations de l'air, comme si celles-ci semblaient pouvoir envoyer au loin tous ses soucis actuels. C'était intriguant, c'était a capela, mais c'était prenant.

Cependant, le chant mourut sur les lèvres de l'individu probablement dérangé par la présence soudaine du vieux renard et leurs regards se croisèrent. Les différences oculaires du chanteur frappèrent tout d'abord Thadas mais il n'en fit pas un cas - il avait déjà rencontré de nombreux mutilés et blessés qui pouvaient arborer ce genre de trophées sur leur visage. Thadas se demanda ce qui est arrivé à cet œil maintenant blanc, puis haussa légèrement un sourcil et sa bouche se releva un peu en coin, les yeux scintillant doucement.

- C'est agréable. Je ne pensais pas que les étrangers pouvaient être dotés d'une si belle voix.

En tant que religieux, les chants faisaient souvent partie de son quotidien car les dieux et les esprits de la nature apprécient tout particulièrement ce genre d'offrandes vibratoires, ce n'était donc pas étonnant qu'il y fut sensible surtout quand on connait son goût pour les belles choses.
Le bonze se décolla un peu de l'embouchure et s'approcha calmement de sa démarche souple et un peu féline, prenant son temps. Il inclina subrepticement la tête en signe de salut et s'arrêta à quelques pas du lit puis continua.

- Je me présente : Thadas Hallrar. Je suis le Grand Prêtre de cette paisible contrée. Je suis venu m'enquérir de l'état de nos invités et m'assurer que vous vivez bien votre séjour dans notre palais.

"Et vérifier en plus si vous prévoyez de provoquer des remous dans cette paix si précieuse ou non, ainsi qu'enquêter sur vos mœurs et vos agissements."

Un chat miaula tranquillement, apparaissant comme par magie et vint se frotter aux jambes du pontife en ronronnant. Tiens, serait-ce un envoyé des dieux ? Quoi qu'il en soit, après quelques instants de plus, il trotta vers le lit et y fit un bond puis y posa son cul, l'air particulièrement confiant avec un regard suffisant et supérieur.

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Le vrai pays d'un Homme...

Il est fort. Très fort. Si fort que Thadas ne savait pas exactement s'il devait croire à tous ces épanchements d'émotions ou non, n'en laissant toutefois rien paraître. Thadas n'est pas vraiment le genre d'homme à se repaître sur le malheur et la souffrance d'autrui, mais il est aussi rusé que sceptique de nature. Il avait apprécié l'audace des premières paroles ayant suivi sa brève présentation d'il y a quelques instants, car elle était d'une élégance qui ne lui était pas indifférente.
Pour un peu, il aurait presque marché, surtout qu'autant de remerciements et de politesses bien qu'étonnamment effusifs faisaient franchement plaisir - il ne faut pas oublier que Thadas est très attaché à Ijoba. Son ego patriotique s'en retrouvait quelque peu gonflé, uniquement l'espace d'un court instant puisqu'il le maîtrisa au mieux... Après tout, c'est en général quand l'ego se mêle de nos affaires que ça fout de la merde partout, n'est-il pas ?

C'est un détail qui le fit un peu tilter, plus précisément l'appellation "paisible peuple", car il ne put s'empêcher de la trouver légèrement ironique. C'était idiot, mais même s'il se trouvait face à un compère humain, il ne pouvait pas lui faire confiance d'entrée de jeu, pas tant qu'il n'est pas certain de savoir qui il a en face de lui ; ce sont les bases de la stratégie enfin, que ce soit dans le militaire ou dans le social.
Attend, observe, analyse, agit.

Pas compliqué, suffit d'appliquer.

Le Grand Prêtre se mit à croiser les bras, scrutant attentivement Genzo San, puisque c'était son nom. Hmm, c'était donc bien lui qui faisait partie des quelques étrangers étant particulièrement intenables, selon certains gardes avec qui il a discuté.
La détresse dans son œil de jais le troubla bien qu'il ne le montra pas, son aura gardant la stabilité et la solidité d'un roc.

- … Est-ce qu'on vous gêne ? Est-ce que c'est mal de... d'essayer de faire comme nous faisions avant... chez nous ?  … Il nous manque, notre chez nous... vous savez ? Il y avait des chats... de là où on venait.

Le religieux se caressa légèrement la barbe, respirant profondément et silencieusement, ses ambres plantées dans l'onyx du voyageur, scintillant de leur habituelle lueur à la fois sérieuse et déterminée.

- C'est difficile de ne pas sentir une certaine gêne quand notre quotidien se retrouve soudainement troublé par des éléments étrangers, surtout quand cela s'ajoute au sinistre de l'ouragan, qui fut traumatisant pour certains.   , répondit Thadas d'un ton franc, clair mais tranquille. Certains habitants vous craignent en effet car vous êtes des inconnus et que l'on ne sait jamais ce que nous réserve l'inconnu, mais selon moi c'est une occasion inédite d'ouvrir nos horizons que de faire connaissance avec des humains venant d'ailleurs.

Thadas sait manier les mots et s'il le peut, il préfère largement l'honnêteté à la mièvrerie d'un mensonge. Ce n'est pas avec des mensonges qu'il éclairera les Ijobiens mais au contraire en les aidant à tenir bon face aux éclats parfois tranchants de la vérité. Bon, certes, ce type n'est pas un Ijobien, mais s'il s'est incarné en humain pour bosser dans le spirituel, c'est pour aider ses prochains humains et ce qu'importe leur ethnie.
Du moins, tant qu'ils ne sont pas un danger pour l'île et ses habitants...

Le chat s'approcha en quelques pas presque séducteurs de Genzo et se frotta contre son bras en ronronnant de nouveau, toisant les deux hommes. Putain, ils sont cons ces humains, elle est où la bouffe ? MIAOU ! L'humain au ruban me donne pourtant toujours du super bon manger, qu'est-ce qu'il fout ?! Ilécon ! HUMAIN ! OBÉIS MIAAAA !

Bien sûr, difficile de deviner les ordres impérieux que lancent silencieusement les iris rondes du félin opportuniste. Et pourtant, Thadas s'approcha de la boule de poils et, sortant un biscuit cuisiné par une de ses connaissances aimant inventer des recettes pour les espèces autres à l'humain,  s'agenouilla pour le lui donner. Le capricieux matou sniffa la friandise quelques instants, puis la chipa des mains du bonze pour la grignoter sur les draps avec gourmandise. Pendant qu'il faisait ainsi, Thadas caressa délicatement sa tête - les chats n'aiment pas être brusqués, alors il prend ses précautions, détendu mais alerte.
Un coup de griffe est si vite arrivé.

- Je ne vais pas prétendre pouvoir comprendre la peine qui vous serre le cœur, mon cher Genzo San.

Le félidé croquait avec enthousiasme la nourriture - il avait enfin compris, ce con d'humain, pas trop tôt ! Thadas continua sa tirade, reposant de nouveau ses yeux sur le visage de l'homme borgne avec une étincelle dynamique dans le regard qui contrastait assez avec son allure décontractée et plus encore avec le sérieux de son visage.

- C'est dur de ne pas être complètement libre de ses mouvements. D'être restreint, d'être surveillé.

Le félin continuait de ronronner entre deux goulées de miettes goûtues. Thadas lui donna une dernière caresse puis se releva, recroisant les bras.

Le vrai pays d'un Homme, c'est sa Liberté, son Indépendance.
Le vrai pays d'un Homme se trouve dans son Cœur.

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- D'avoir l'impression que chaque pas qu'on fait peut se retrouver mal interprété... Qu'on vous pousse à ne pas vous montrer...   , compléta doucement le voyageur avant de soupirer. Oui, c'est dur.

Il avait un peu des airs de poète maudit, par moments. Thadas n'aimait pas se plaindre ni les plaintes en général, mais son empathie pour ses consœurs et confrères humains lui avait appris à lire derrière ces mots qui leur déchirent la poitrine. Une oreille attentive et un esprit ferme suffisaient généralement à la fois à les soulager de leur poids émotionnel et à la fois à les relancer sur leurs travaux respectifs. Les Natifs n'ont que rarement le temps de lambiner, il y a toujours quelques chose à accomplir pouvant servir leur société solidaire. C'est pour cela qu'il faut prendre soin les uns des autres pour continuer d'avancer main dans la main.
Sauf qu'il ne s'agit pas d'un ijobien, ici. Il faut d'abord apprendre à se connaître mutuellement. C'est d'ailleurs ce pourquoi Thadas qui en général ne se gêne pas pour tutoyer la majorité des personnes qu'il rencontre a cette fois-ci choisi le vouvoiement par pure diplomatie. Surtout quand il s'agit d'étudier un individu soi-disant assez récalcitrant selon les gardes.

Thadas, lui, avait plutôt l'impression d'avoir un chat en face de lui, outre celui continuant de faire le moteur tout en léchant les miettes éparpillées sous son menton velu. Et c'était au chat de s'exprimer, alors il le laissa parler tandis que leur discussion avançait tranquillement, le visage restant majoritairement imperturbable outre l'intérêt qui brasillait doucement dans ses agates. Tiens, il posait des questions sur leur culture ? Bien, ça permettait déjà un premier pas entre leurs deux civilisations. Thadas ne put s'empêcher d'esquisser un sincère sourire d'amusement quand le chanteur lui demanda son âge, apportant un peu de pétillant à ses traits sérieux.

- Je suis l'intermédiaire entre les Dieux et les habitants d'Ijoba. Je suis en charge de la sécurité sur le plan énergétique de chacun, de même que tous mes consœurs et confrères religieux.  , répondit Thadas de sa voix suave et profonde, respirant calmement. Cela répond-il à votre question ?

Le bonze se mit à caresser sa barbe finement taillée, ses yeux se plissant alors qu'un léger ricanement souleva sa poitrine, amusé par cet homme qui lui faisait face. Il nota qu'il disait "ouragan" comme les ijobiens ont l'habitude de le dire et non pas comme l'étrange usage du mot "ans" que d'autres étrangers avaient pu leur servir. C'était à n'en pas douter quelqu'un de malin et qui n'a probablement pas ses oreilles dans ses poches.

C'était une sacrée danse des mots qu'ils faisaient depuis quelques minutes et Thadas se prit à apprécier d'observer où elle les menait petit à petit.

- 36 ouragans, toutes mes dents, et en cadeau l'impression d'être aussi énergique qu'il y a vingt ans. Et vous, mon cher, si vous me permettez, quel est donc votre âge ?

Donnant-donnant.
Ce Genzo San était un curieux bonhomme, quel que soit le sens que l'on donne à ce qualificatif. D'instinct, le flamine sut qu'il devait faire très attention aux informations qu'il acceptait d'échanger avec cet étranger. Ça n'en donnait pas l'air, mais chacun de ses mots était soigneusement calculé...

- En quoi est fait ce que vous avez donné au chat... Il a un nom ?   , sourit Genzo San.

Thadas haussa légèrement un sourcil en expirant un rire presque silencieux, caressant délicatement ses paumes l'une contre l'autre puis les faisant passer en de discrets gestes fluides autour de ses mains pour re-stimuler le passage des énergies à cet endroit. Il tira tranquillement une chaise pour s'asseoir tout en répondant ou plutôt rétorquant.

- Je ne le sais pas, ce n'est pas moi qui l'ai cuisiné... J'imagine que l'attention en est l'ingrédient principal.

Droit contre le dossier de sa chaise, les bras croisés en une posture décontractée, il continua.

- Quant au nom... Est-ce qu'à la place de Genzo San vous aimeriez que je vous renomme Zilbree, ou Chaton ? Les chats sont libres, ici, de venir et d'être comme ils le souhaitent, et comme de nombreux autres compagnons animaux, savent cohabiter pacifiquement avec les humains. Je ne suis pas arrogant au point de leur donner un nom qui n'est pas le leur.

Thadas aimait faire passer des messages tellement implicites qu'on douterait de leur existence à travers ses mots, jouant sur le quasi-stoïcisme de son faciès et de son aisance orale.
Son orteil tressauta subrepticement quand tout d'un coup son interlocuteur claqua dans ses mains à la suite de ses paroles et Thadas n'en scruta son unique œil que de plus belle, cherchant à anticiper l'éclair qui semblait avoir traversé son cerveau.

- Je sais, vous connaissez action ou vérité ?
- Action ou... vérité... C'est un jeu ?

Hmm, qu'est-ce qu'il lui prépare donc ?
Le chat finit de se lécher les babines et s'étira longuement avant de bondir du lit pour se diriger de nouveau vers Thadas, et ne se gêna pas pour sauter sur ses genoux, quêtant des papouilles que le prêtre lui octroya tranquillement.

Apprivoiser n'est jamais facile, et tout jeu a ses règles. Thadas fit comprendre par son regard un peu intrigué à Genzo San qu'il attendait plus d'explications sur les tenants et aboutissants de sa proposition.

- Vous savez quoi ? Je pense que le mieux est que vous commenciez.

"Ça m'intrigue. Et c'est drôle, ça me fait un peu penser au jeu pour mômes "Oorun la vérité, Odale l'activité" qu'on avait tendance à faire pour coller des gages aux autres." C'était bien loin derrière, tout cela.

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Le jeu et ses dangers

- Appelle moi Chaton. Miaou. Effectivement le mieux est que je commence. C'est un jeu d'enfant ou d'adolescent, mais c'est parfait pour apprendre à se connaître en riant un peu. Chacun notre tour nous choisissons entre Action ou Vérité. Par exemple, si je choisis action, tu me donnes un gage ; si je choisis vérité, je dois répondre à une de tes questions avec toute la sincérité du monde. A ton tour c'est l'inverse, je donnerai le gage ou la question. Rien d'incroyable... Mais ça permettra de se connaître.

Ce gars, c'était un joueur, à n'en pas douter. Le sourcil de Thadas grimpa doucement d'un niveau sur son front sérieux, une lueur d'amusement pétillant dans ses iris. Ce voyageur n'est pas banal. Enfin, aucun ne l'est vraiment, c'est normal qu'ils paraissent bizarres puisqu'ils n'ont pas la même culture, mais Thadas n'aurait jamais cru s'amuser autant avec une simple discussion... et avec cet homme. À l'origine, il était venu uniquement pour saisir tous les éléments de leur situation à tous, mais découvrir un individu de la sorte était encore plus plaisant qu'il ne l'aurait imaginé. Plus les secondes défilaient et plus un voile intangible commençait à se relever, tel le rideau d'une scène de théâtre.

"Heureusement que j'ai un peu de temps, cet après-midi... Je pourrais apprendre des choses intéressantes." songea le bonze alors que Genzo San lui souriait de la position assez extravagante qu'il avait choisie, soumettant son choix.

Action, hm ?
Il nota le subtil passage au tutoiement et ça le fit étonnamment un peu ricaner en son for intérieur. Il a de l'audace, le bonhomme. Un sourire plus acéré qu'il ne l'aurait voulu étira ses lèvres et il posa ses coudes sur ses genoux alors que le chat les libérait enfin en laissant une traînée de poils poussiéreuse, toisant tranquillement son interlocuteur. Il laissa traîner le suspense quelques secondes de plus sans aucune vergogne.

Il voulait jouer, hein ?

Il sut assez rapidement ce qu'il voulait que Genzo San fasse et ne se priverait pas de l'obtenir, puisque les règles de ce jeu le lui permettaient. Et puis.... Thadas finit toujours par obtenir ce qu'il désire - du moins quand ça ne finit pas en l'écho désagréable d'une claque outragée.

- Eh bien.... Chante donc pour moi, chaton.

Amusons-nous, en effet.
Le prêtre ne se risquerait toutefois pas tout de suite à choisir la voie périlleuse de la vérité, c'est donc sans aucune honte qu'il choisira celle de l'action quand viendra son tour afin de protéger les données qu'il garde précieusement. Il n'est pas fou, il aime bien les jeux aux règles bien posées mais en tant que haut-placé, il ne mettra pas en péril les siens par d'éventuelles fuites d'informations causées par un divertissement. Il ne sait pas de quoi sont capables ces étrangers, pour l'instant.

Le chat à ses pieds miaula, souhaitant un autre biscuit, espérant probablement que d'avoir laissé cet humain caresser son pelage sacré lui permettrait d'atteindre son objectif primitif. Tssk, vraiment, que des manipulateurs, ces bestiaux.

- Tch-tch.   , fit Thadas à l'attention du félidé avec un regard sévère.

Il ne comptait pas lui donner toutes ses réserves alors que d'autres chats éplorés aussi cherchent péniblement des mets de qualité en-dehors du palais.
Et puis, il a beau être généreux avec ces "malheureux".... Ça se mérite, les friandises.

"Chante donc, petit rossignol, laisse-moi lire ton âme à travers tes sons."

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Décidément. Du poète maudit au chat joueur, le voici qu'il révélait en sa plus grande beauté ses capacités de comédien. Que celles-ci soient employées cette fois non pas à manipuler mais plutôt à des fins artistiques était un spectacle magnifique. Les yeux fauves de Thadas suivaient le moindre de ses mouvements, pris dans l'histoire qu'il lui racontait - pour un peu, il se serait surpris à la vivre à travers son chant. Parce que, clairement, cet homme vivait la moindre des paroles, la moindre onde sonore qu'il émanait de sa puissante cage thoracique, mêlant la douceur et la sensibilité de son interprétation avec le côté joueur et profond de son timbre. Une telle ferveur, pour un homme de foi, ne pouvait que résonner avec son âme, ne serait-ce que le court instant pendant lequel la représentation du lascar dura. La hardiesse et l'assurance du chanteur éveilla une lueur amusée dans les prunelles du prêtre, et son sourire s'élargit un peu plus, révélant quelques dents blanches.

Celui-là, c'est un sacré numéro, sa sourde intuition ne l'avait une fois de plus pas trompé.

Thadas laissa ses frissons s'estomper doucement avec le silence, s'étant redressé sur sa chaise pendant le mini-concert privé donné par Genzo San en une position enracinée afin de mieux en profiter.
Ses yeux perçants avaient noté que bien qu'il soit dynamique et réactif, son corps ne semblait en effet pas totalement remis de sa probable récente escapade - Thadas avait du mal à imaginer un type dans son genre rester inactif et enfermé. Cela tombait bien que sa mélodie l'ait attiré ici... Il pourrait ainsi continuer de jauger jusqu'où cet homme serait capable d'aller et vers où - il a l'air du type déterminé voire entêté, même si Thadas pourra juger de cela plus précisément après. S'il arrive à cerner les bons rouages à faire coulisser avec cet homme, il aura peut-être ainsi la clef permettant de gérer ce genre d'individus chez leurs "invités".

- Bon. Je te ferai la suite si tu demandes ~   , fit l'homme à l’œil d'obsidienne en retrouvant le confort de sa couchette.
- Je n'y manquerai pas... J'aime découvrir de nouvelles histoires, surtout quand elles sont chantées.  , dit Thadas en plissant légèrement un œil, décidément intrigué par cet étranger. Si tu le souhaites... J'aimerais t'apprendre quelques chants sacrés, plus tard. Je suis certain que les dieux seront ravis par tes dons de chanteur.

C'était une proposition sincère, bien qu'elle recelait bien plus d'objectifs qu'elle ne laissait à penser.
Thadas est un vieux renard, il ne faut pas l'oublier.

- Action ou Vérité, grand prêtre ?

Thadas rendit son regard défiant avec un petit sourire coriace.

Il ne l'avouerait peut-être pas, mais il aime tester les gens.

- Hmm..... Action.

Voyons jusqu'où irait l'audace de ce chanteur venu d'ailleurs.

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